En introduction, la FA-FPT souhaite évoquer le sentiment d’inquiétude qui prévalait au moment où le gouvernement, qui présidait aux affaires de notre pays en 1983 et 1984, a souhaité entamer cette grande réforme de décentralisation. La crainte perceptible à l’époque s’appuyait sur l’hypothèse de voir les dispositions mises en place à l’Etat s’imposer aux collectivités locales, notamment pour ce qui concerne les notions de cadres d’emplois et de filière par rapport aux corps de la fonction d’Etat. Il y avait aussi une certaine crainte de l’inconnu, du fait de la disparition du statut des agents communaux et du statut particulier des Offices d’HLM, par exemple.

Presque 30 ans après la mise en place de la décentralisation, la FA-FPT a le sentiment que cette démarche n’est jamais arrivée à son terme et du même coup, que l’esprit du législateur de 1981 n’a pas été totalement respecté et ne s’est pas imposé. Pour mémoire, la transposition de la réforme de la catégorie B dans la Fonction publique territoriale se limite peu ou prou à un copier coller des dispositions adoptées à l’Etat. La spécificité de certains métiers de la Fonction publique territoriale ne trouve aucune place dans cette transposition.

La question de la reconnaissance des compétences d’une filière à l’autre pose de vraies difficultés, à la fois pour les personnels concernés tout comme pour les employeurs. Trop de rigidité prévaut dans l’application du statut.

Aussi, le passage d’une filière à l’autre pourrait s’envisager de manière beaucoup plus perméable, sans imposer aux agents de passer un nouveau concours, mais en prenant en compte le parcours professionnel et la validation des acquis de l’expérience, complétés si besoin par des actions de formation.

Cette perspective permettrait, par exemple, de répondre aux problématiques de fin de carrière de certains cadres d’emplois particulièrement exposés (cadre d’emplois des sapeurs-pompiers professionnels non officier par exemple), tout en maintenant le bénéfices des dispositions statutaires propres à ces cadres d’emplois. Pour la FA-FPT, cette souplesse permettrait également d’aborder la pénibilité, avec une vision moins contraignante.

La question de la formation professionnelle est également symptomatique des écarts de traitement entre les fonctionnaires d’Etat et les agents des collectivités locales. Pour la plupart des corps à l’Etat, la formation professionnelle est un vrai droit acquis.

Dans la Fonction publique territoriale, le droit à la formation est loin d’être reconnu à sa juste valeur et son exercice n’est pas toujours facilité. Là encore, il s’agit d’un manque de reconnaissance des agents des collectivités territoriales pour ce qui concerne leur volonté d’accéder à des formations qualifiantes. La VAE par exemple, comme le DIF, sont peu utilisés.

La formation professionnelle des agents des petites collectivités est parfois un vrai chemin de croix. Organiser mieux leur remplacement pendant les périodes de formation améliorerait déjà beaucoup la situation. Cette situation est d’autant plus paradoxale que le Centre national de la Fonction publique territoriale est connu et reconnu pour la qualité de ses actions de formation et son expertise en matière d’ingénierie de formation.

Les difficultés de prise en compte de situations spécifiques, comme celles des secrétaires de mairie, des titulaires de l’examen professionnel de rédacteur, des opérateurs des centres de traitement de l’alerte ou des secrétaires médicales des services départementaux d’incendie et de secours posent la question de la réelle reconnaissance des niveaux de compétence et d’implication de ces agents dont la population se limite à quelques centaines de personnes seulement à l’échelon national. Là encore, on se heurte à un poids excessif de la DGAFP qui freine le règlement de ce type de situation. Mais les associations d’élus font également valoir leur réticence en raison du coût que représentent, selon eux, de telles régularisations.

Autre exemple révélateur de la différence de traitement entre les différentes Fonctions publiques, la prise en charge de la couverture complémentaire en matière de santé. Cette disposition hautement symbolique pour ce qui concerne la protection sociale des personnels s’est mise en place sans difficulté particulière et rapidement à l’Etat. Les fonctionnaires territoriaux eux, devront faire jouer le rapport de force avec leurs collectivités pour en bénéficier, presque trois ans après leurs homologues de l’Etat !

Enfin, la situation des agents confrontés à l’emploi précaire mérite elle aussi d’être regardée avec attention. Les dispositions récentes permettant de résorber la précarité au niveau de l’Etat sont bien moins contraignantes que celles proposées dans les négociations en cours pour les agents territoriaux.

Voici les propositions et observations susceptibles de conforter la Fonction publique territoriale sur l’échiquier de la Fonction publique et de lui donner trente ans après la première loi de décentralisation, un nouvel élan et sa vraie place.

Ces propositions s’inscrivent pleinement dans la vision que la FA-FPT a de son rôle de partenaire social au moment où la remise en cause du paritarisme s’est s’imposée. La FA-FPT pourtant, au travers de son expérience au sein du Conseil supérieur de la Fonction publique territoriale, a la conviction que le paritarisme est une vraie richesse en matière de dialogue social et le fonctionnement riche et efficace du Conseil supérieur l’a démontré.

Pour conclure sur une proposition à laquelle la FA-FPT demeure très attachée, nous pensons que la prise en compte des richesses produites par les services publics et des dépenses évitées grâce à l’intervention de ces mêmes services permettrait de sortir de cette approche toujours très réductrice qui consiste à mettre systématiquement en avant les coûts de fonctionnement du service public pour le contribuable. Une mission parlementaire qui s’attacherait les compétences d’économistes n’aurait pas de difficulté à mettre en place des indicateurs fiables sur les économies réalisées, par exemple, lors d’une prise en charge précoce d’un accident vasculaire cérébral, la sauvegarde des biens de production d’une entreprise en proie aux flammes ou l’accompagnement des personnes dès les premiers signes de dépendance.

Il ne s’agit pas là d’une revendication, mais tout simplement d’une proposition citoyenne.